En raison de sa plasticité, le cerveau se ré-agence en permanence. C’est une jungle grouillante où les cellules colonisent le moindre espace vacant.
Christian Marendaz
Professeur au laboratoire de psychologie et neuro-cognition de l’Université de Grenoble / CNRS.
En recherche d’économie, du maintien de son « homéostasie » (son équilibre) l’humain n’aime pas être déstabilisé. L’histoire raconte que c’est le plus souvent lorsqu’il y est contraint, qu’il fait évoluer ses pratiques et ses comportements.
Il est toujours plus facile et plus économique de faire ce que l’on connait déjà, même si cela n’est pas satisfaisant, plutôt que de se risquer à explorer de nouvelles pratiques. A l’inverse, tout changement va souvent être perçu comme une perte, un appauvrissement et au final une menace. Une menace qui pour être surmontée, transformée, nécessite une réadaptation du cerveau, ce qu’il sait très bien faire, mais à certaines conditions.
Cette élasticité neuronale, découverte par Geoffrey Raisman, semble liée à deux phénomènes, dont la mise en œuvre ne dépend que de nous-mêmes :
La curiosité et l’empathie !
C’est en 2020 que paraissent les premiers articles qui relient la plasticité neuronale de notre cerveau, à ses capacités à réagir aux stimulations, issues des troubles et lésions causées par des dépressions et des burnouts. Ces articles dévoilent que cette plasticité s’exerce grâce à cette extraordinaire hormone de la bonne humeur que l’on appelle la sérotonine.
Être de bonne humeur
nous permet de régénérer nos neurones en permanence !
On sait que le corps humain a besoin de se ressourcer, qu’il lui faut respecter pour cela des cycles : de sommeil, d’activités, d’introspection, de concentration, pour valoriser au mieux ses potentiels.
Au même titre qu’un corps humain, comme pour tous les organismes vivants, une équipe a besoin d’espaces d’inspiration, d’expressions, de ressourcement, de temps d’écoute, de bienveillance, pour gagner en maturité, c’est à dire en capacité à se saisir collectivement de problèmes complexes.
Des activités qui, indépendamment de nos croyances, favorisent biologiquement : la curiosité et l’empathie sources de la sérotonine.
Donc, en aucun cas, des idées « new âge » de managers humanistes !
Rares sont les Managers / Dirigeants, qui prennent en considération les réalités biologiques des humains, qui constituent les membres de leurs équipes. C’est pourtant une nécessité, afin de ne pas se contenter d’atteindre « au plus vite » un résultat, mais de grandir ensemble, afin d’atteindre « au mieux » ce résultat, tout en apportant de la valeur-ajoutée pour l’entreprise.
Alors si biologiquement, notre cerveau est apte à se ré-agencer en permanence, comment utiliser cette aptitude, de plasticité neuronale, pour faciliter, accompagner le changement ?
C’est de la responsabilité du manager. Il lui faut créer les conditions nécessaires au développement de la plasticité neuronales de ses équipes, condition pour que les changements nécessaires puissent s’opérer dans les meilleures conditions. Pour cela, il peut s’inspirer des principes du vivant, des principes qui se fondent sur les dernières découvertes en matière de neurosciences, afin de mieux accompagner ses équipes face aux changements/évolutions, qu’appellent le monde qui vient.
Pour nourrir la curiosité et l’empathie, ces stimulants de l’hormone de la bonne humeur, il lui faut accompagner ses équipes afin de co-construire un sens partagé (une étoile, une direction) pour leur donner l’ « en-vie », tout en nourrissant la confiance permettant de dépasser les craintes, et le sentiment d’inconfort, lié aux changements envisagés.
Une nécessité à l’époque qui est la nôtre, car les changements ne se limitent plus à des améliorations de l’existant, mais bien à de vraies remises en cause des pratiques et des représentations.