« Quand je suis arrivé au poste de Président du réseau Système U, je ne connaissais pas grand-chose de ce qui m’attendait, de ce que je pouvais et devais faire. J’ai réuni mes équipes, et je leur ai partagé, que j’avais besoin d’eux, d’elles, j’avais besoin qu’ils m’expliquent la situation, la gouvernance, les enjeux, bref, je leur ai posé des questions Pour cela, il faut connaitre ses limites, avoir un peu d’humilité et se mettre à l’écoute des autres. Le sens, nous l’avons construit ensemble ». Serge PAPIN. Ancien Président du réseau
Nous le savons, la carte, n’est pas le territoire. Dit autrement, notre système de croyances et de représentations, au nom duquel un dirigeant, un manager va agir et prendre des décisions, ne représente pas la réalité, mais l’idée qu’il/elle s’en fait. Si cartes et représentations ne décrivent qu’une partie de la réalité, elles disent beaucoup de ceux qui les produisent et de leurs systèmes de croyances.
Aujourd’hui, dans l’époque incertaine qui est la nôtre, plusieurs systèmes de croyances, autrement appelés paradigmes, s’entrechoquent. Il est intéressant de les identifier afin d’en apprécier les conséquences tant dans nos sociétés modernes que dans les entreprises.
Premier paradigme : Ne changeons rien.
Système dominant actuellement, il se traduit au niveau gouvernemental, par des politiques de relance nécessaires afin de « revenir comme avant », de « relancer la croissance », ou bien de « rattraper le retard ». Cette incapacité à voir les signes, percevoir les évolutions en cours, se traduit dans le monde de l’entreprise, par des disparitions aussi soudaines que brutales. Que l’on se souvienne de la Swissair, de Kodak, ou de la banque d’investissement Lehman Brothers, pour ne citer que les plus célèbres.
Deuxième paradigme : La science et la technologie.
Elles vont nous permettre de résoudre les déséquilibres, et autres difficultés générées par le développement exponentiel de nos sociétés modernes. Un système de représentation incarné entre autres, par le chef d’entreprise et milliardaire d’origine sud-africaine Elon MUSK. Bitcoin, constellations satellitaire, voitures électriques, puces électroniques, et autres innovations technologiques deviennent les nouveaux “graals” du monde qui vient. Les entreprises qui s’engagent sur cette voie, conçoivent le plus souvent l’organisation, comme un ensemble de fonctions mécaniques, qu’il suffit d’orienter, d’animer et de piloter afin d’atteindre efficacement les objectifs fixés. Burnout, arrêts maladies, pertes de motivation, multiplications des tensions et des conflits, dans ce système de représentations, les humains sont souvent réduits au rôle de variables d’ajustement.
Troisième paradigme : Le développement durable.
Créée en 1971 le premier ministère de la protection de la nature et de l’environnement, (avec la création du parc national de la Vanoise en 1963) marque la prise en compte, certes encore timide, de cette « nature » qui nous environne, et dont le rapport de Rome (1972) nous signale la fragilité et la limite. Un paradigme qui vise à faire de la même chose mais de façon plus propre, et plus économe. Il se traduit dans les entreprises, par la création des Directions du Développement durable puis les RSE (responsabilité sociale des entreprises), positionnée encore trop souvent à la marge des gouvernances d’entreprises
Quatrième paradigme. La décroissance (faire moins, de la même chose).
Popularisée entre autres par L’agriculteur/philosophe Pierre RHABI, ce paradigme prône la « sobriété heureuse », le fait de vivre mieux, avec moins. Il s’agit toujours du même système de représentation, mais plus économe. Dans les entreprises, c’est la politique des « Cost Killer », de la recherche de la performance des économies, et du retour au « cœur de métier »
Le cinquième paradigme. La colapsologie.
Une notion qui revient souvent dans l’histoire, celle de l’effondrement, popularisée aujourd’hui, sous le terme de « colapsologie »,à la fois inévitable et préalable à l’émergence du nouveau. Un paradigme de « destruction créatrice » largement popularisé en son temps, dans le champ économique par Joseph Schumpeter.
==> Aucun de ces paradigmes, ne questionne la structure du système de représentation aujourd’hui en place. Dans les 5 options rappelées ici, il s’agit de le consolider, d’y ajouter de la technologie, de le rendre plus propre, ou moins destructeur, mais en aucun cas, de le questionner.
Reste un sixième paradigme, Faire le choix du vivant.
Ce paradigme ne propose pas de réponses toutes faites, n’invente rien. Il propose un processus basé sur les principes du vivant, processus qui va permettre l’émergence du non advenu, l’émergence de nouvelles réponses adaptées aux nouveaux enjeux et au final, l’émergence du sens.
Un sens co-construit et porté par les acteurs associés. Ne dit-on pas que le sens guérit, car il permet la convergence des différences ? Mais pour construire et faire vivre un « sens partagé », manager et dirigeants se doivent de sortir de leurs expertises, de se mettre à l’écoute, et de piloter un processus d’émergence qui fait largement appel aux outils de l’intelligence collective. Ils doivent devenir « porteurs de sens ».
« Le jour n’est pas éloigné ou le problème économique se tiendra à sa vraie place,
sur la banquette arrière, et où notre cœur et notre esprit seront occupés – ou plutôt réoccupés- par nos vrais problèmes,
ceux de la vie et des relations entre les humains, ceux des créations de l’esprit »
John Maynard KEYNES – Lettre à nos petits enfants (1930)